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Interview : Le nouvel Attila

aujourdhui-labimeLe nouvel Attila succède à la maison d’éditions Attila qui fut créée en 2007 et s’est depuis séparée en deux entités (le nouvel Attila et le Tripode). Ayant déjà fait parler d’elle avec l’excellent « Aujourd’hui l’abîme » de Jérôme Baccelli et attendant les sorties du très prometteur « Comment élever sa Volkswagen » de Christopher Boucher ainsi que de la révélation « Napoléonesque » que va être « Le secret de Saint-Hélène » de Henning Wagenbreth, nous avons pu poser quelques questions à Benoit Virot, le créateur du nouvel Attila :

1/ Qu’est-ce qui vous a décidé à sauter le pas et à créer votre maison d’édition?
La frustration de devoir se battre autant pour trouver les auteurs qu’on aimait en librairie. Un certain conformisme éditorial, le désir de bousculer les hiérarchies, et le manque de curiosité de la critique pour une partie de l’histoire littéraire (il y a toujours des choses à réparer côté injustices) et de la production littéraire (small is often beautiful).

2/Pourquoi avoir choisi de travailler dans ce domaine?
J’ai rencontré à l’école de journalisme de la rue du Louvre (CFJ) les deux frères avec qui j’ai lancé la revue Le nouvel Attila, précurseur de l’aventure. Nous voulions faire quelque chose de nos mains. C’est le hasard d’une nuit de dérive et d’ivresse qui a décidé de notre engagement dans une revue littéraire plutôt que dans un magazine politique ou de reportages.

3/ Quelle est votre politique/ligne éditoriale?
IL n’y a pas de ligne ; les lignes, on s’amuserait plutôt à les pourfendre et à les bouger.couv-VW-def-202x300
La maison d’édition s’est fait connaître il y a sept ans en rééditant des auteurs oubliés, épuisés, pilonnés (Gog, de Papini ; Ascension, de Ludwig Hohl ; Le Roi et la Reine, de Ramon Sender). On a très vite été identifiés à des redécouvreurs de pépites, ce qui fut un avantage (en facilitant la reconnaissance) aussi bien qu’un inconvénient (pour imposer de jeunes auteurs). De fil en aiguille, on a ajouté des traductions à notre arc. Puis arrivent, par fascination ou émulation pour le reste du catalogue, les Français, le sel de notre métier, le terrain où le cœur de l’éditeur se met à vibrer, où on entre de plain pied dans le terrain de la création. La politique, c’est celle du catalogue : faire des liens entre les textes ; suivre des auteurs au long cours, qu’il s’agisse de redécouvertes de textes plus anciens (Ramon Sender, Ludwig Hohl) ou de jeunes auteurs indispensables (Bérengère Cournut, Jean-Daniel Dupuy, Jérôme Baccelli).

4/ Comment choisissez-vous les textes, les auteurs avec lesquels vous allez travailler?
Au début, je passais mon temps à arpenter les quais, les bouquinistes, les bibliothèques, les amateurs de livres épuisés… Au bout de quelques années (trois ans), ce sont les rencontres et les auteurs qui m’ont “choisi”. La plupart des manuscrits intéressants nous sont envoyés par admiration pour le travail déjà effectué, notamment sur quelques traductions ou rééditions. Le dernier Français en date, Aujourd’hui l’abîme, m’est parvenu dans le grenier d’une de mes traductrices… Le prochain est arrivé par manuscrit sur un salon le jour de mon anniversaire.

5/ ComCouv-Napo-202x300ment se passe le travail avec l’auteur (et le traducteur le cas échéant) depuis la sélection de l’ouvrage jusqu’à sa sortie?
Une lecture approfondie du texte, généralement en plusieurs temps (lecture découverte et plaisir, qui peut nécessiter elle même de s’y reprendre à plusieurs fois, on n’aime pas toujours un texte du premier coup ; puis lecture annotée ; lecture de vérification, le regard sur un livre, sur ses sens, ses clés, pouvant beaucoup évoluer, et c’est un bonheur de se laisser surprendre).
Puis
un premier courrier à l’auteur pour lui annoncer notre choix et nos premières orientations de travail. Des échanges à l’intérieur de la maison d’éditions sur le sentiment des uns et des autres, les pistes de travail à envisager. Ensuite, des allers-et-retours avec l’auteur jusqu’à aboutir… j’allais dire avec un peu de forfanterie “au texte parfait”, ce qui est une utopie… disons qu’on sent toujours, l’auteur et son éditeur, le moment où il faut arrêter sous peine de commencer à défaire ce qu’on a tissé.
Enfin, choix d’un dessinateur, ou d’un photographe pour la couverture. Puis très classiquement réflexion sur une maquette, un peu atypique, mais pas trop (simple et élégante). Correction. Impression. Service de presse, rencontres, etc.

6/ Un coup de projecteur sur une sortie plus ou moins proche?
Debout-Payé, de Gauz, notre roman de la rentrée : le récit d’un ancien sans papier ivoirien sur ses deux années passées comme vigile à Sephora et à Camaïeu et ce qu’il y a vu que personne n’a vu. Entre chaque séance d’observation secrète de la grande consommation, il revient sur sa famille ivoirienne, les hommes devenus de génération en génération vigiles à paris, et la mémoire politique que lui a transmis sa mère. Un texte drôle, décapant, social, politique, satirique à souhait et hyper attachant.

7/ Quel(s) texte(s) auriez-vous voulu publier?Couv-histoires-192x300
Récemment ? La Ville absente de Piglia, dont a finalement hérité Zulma, les nouvelles incomparables d’Amy Hempel, en cours de traduction chez Cambourakis, et les textes hallucinés d’Henry Darger, qui se préparent aux Forges de Vulcain.

8/Quel(s) texte(s) êtes-vous fier d’avoir porté?
La trilogie d’Edgar Hilsenrath, Nuit-Le Nazi et le Barbier-Fuck America.
Mon dernier né, Comment élever votre Volkswagen : un texte envoûtant, à l’univers déjeté et intrusif, à ‘l’issue duquel vous finissez par parler comme l’auteur.
Et les textes de Bérengère Cournut, notamment le fabuleux Ecorcobaliseur et sa version française du génial Palabres, que tout lecteur du Nouvel Attila devrait avoir lu !

À propos Ted

Fondateur, Chroniqueur

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