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James Baldwin – Retour dans l’oeil du cyclone

Il y a quelques semaines, dans le top 5 de Jake Hinkson ( L’Enfer de Church Street, Gallmeister), l’auteur nous parlait de James Baldwin et en présentant « La Prochaine fois, le feu » il disait ceci : Si vous voulez connaître le problème racial en Amérique, où tout cela a commencé et où ça va, vous devez commencer ici, avec le brillant et long essai de James Baldwin. Dans le sillage des meurtres de Trayvon Martin, d’Eric Garner et Walter Scott, et à la lumière des émeutes de Ferguson, Baldwin est plus incisif que jamais. Un des livres américains les plus indispensables.
James Baldwin est devenu un emblème aux Etats-Unis. Que ce soit pour son travail journalistique dans de longs articles et essais sur la lutte des afro-américains, l’égalité des hommes qu’ils soient blancs, noirs ou autres. Mais c’est également en tant qu’auteur qu’il a su se distinguer et influencer un nombre d’auteurs et d’artistes incalculable tels qu’Allen Ginsberg, Toni Morrison, Jean Genet, Joséphine Beker ou encore Miles Davis.

Retour dans l’œil du cyclone regroupe quatorze articles/essais publiés entre 1960 et 1985 dans différentes revues (Mademoiselle, Esquire, Playboy, …) sélectionnés par Toni Morrison pour cette édition. Nous découvrons à travers ces différents témoignages à une Amérique d’après guerre encore divisée (nord et sud), affrontant ses vieux démons ségrégationnistes. Une Amérique qui avance, mais à petits pas et surtout avec la sensation qu’à chaque fois l’homme blanc est soit « trahi » par les noirs, soit fait une faveur envers la population afro-américaine. Les luttes estudiantines pour une équivalence d’études et de choix de diplômes dans les universités du sud, l’acceptation par les blancs de partager les mêmes places de bus que les noirs après la fin de la ségrégation, etc… : une lutte quotidienne offrant petit à petit plus de libertés pour les noirs dans cette prison à ciel ouvert qu’était l’Amérique. Mais c’est également un magnifique portrait de James Baldwin, des textes mettant l’auteur à nu et révélant toute sa sensibilité et son humanisme, son admiration pour Martin Luther King et son analyse de l’homme et non du symbole est très touchant. Son introduction de « La nouvelle génération perdue » est bouleversante. Le lecteur découvre également une évolution chez cet homme, qui se définissait poète, mais que son ami disait incapable d’aimer. Cet homme qui de par son expérience et ses rencontres va devenir un incroyable humaniste.

« Ce n’est pas vraiment une « révolution noire » qui préoccupe ce pays. Ce qui préoccupe le pays est le problème de son identité. Si, par exemple, on réussissait à changer les programmes dans toutes les écoles afin que les Noirs apprennent plus au sujet d’eux-mêmes et de leur contribution véritable à cette culture, on libérerait non seulement les Noirs, mais aussi les Blancs qui ne savent rien de leur propre histoire. »

Retour dans l’œil du cyclone est une œuvre essentielle en cette période d’obscurantisme. Que ce soit aux Etats-Unis avec l’embrasement progressif de Baltimore et les différentes bavures policières sur les afro-américains ou que ce soit la montée progressive du front national en France, la montée progressive mais certaine du racisme et de la xénophobie de tous genres. Lire un auteur tel que James Baldwin c’est avant tout accepter les différences, admirer une prose talentueuse au service d’un devoir humaniste. Une œuvre essentielle car lire Retour dans l’œil du cyclone, outre le témoignage d’une lutte égalitaire, reste avant tout le plus bel hommage au fameux « vivre ensemble » que l’on entend un peu de partout.

James Baldwin - Retour dans l'oeil du cycloneChristian Bourgois éditions
Trad. Hélène Borraz
230 pages

Ted.

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