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Jon McNaught- Automne

Petit matin et douceur du soir au coeur d’une petite ville tranquille des Etats-Unis. Deux histoires qui mettent en avant des jeunes garçons au quotidien sans tracas, dont les journées se déroulent dans la monotonie des vies ordinaires. L’un travaille dans une maison de retraite tandis que l’autre distribue des journaux après ses cours. Gestes répétitifs, confort des habitudes, doux alanguissement de cette citée balnéaire qu’utilise en trame Jon McNaught pour son album Autonme, virtuose des récits doux-amers plein de grâce et de poésie.

Utilisation de cases assez petites et très serrées qui forment une respiration ténue, puis pleine-page qui surgissent subitement et qui nous coupe le souffle: Jon McNaught a un style de mise en page bien à lui et il ne s’encombre que très peu des phylactères, préférant laisser  place à sa palette de couleurs incroyables et à la minutie des scènes choisies et détaillées avec une patience mêlée à une tendresse toute palpable.

Jon mcnaught autonme image

Chaque action se prolonge sur plusieurs vignettes: la découpe d’un légume, l’escalade agile d’un écureuil ou encore l’envol d’une nuée, les détails foisonnent et forment l’histoire. Pas de rebondissement, pas de synopsis alambiqué, pas de surplus inutile pour ameuter les foules, juste la vie telle qu’elle est. Des petits riens qui font un si grand tout, des menus détails qui peuplent l’existence et qui complètent et apportent une dimension sentimentale aux deux récits d’Automne. Il s’agit d’une complémentarité délicate à l’équilibre savamment choisi et appliqué, dans la lignée d’un story-board méticuleusement réalisé. Un story-board d’un genre nouveau, qui ne prétend pas vendre un produit mais juste parler de la vie.

A l’image de l’arrière-saison, les couleurs évoquent les derniers rayons du soleil de l’été, la fin des vacances et l’atmosphère particulière qui s’en dégage. Jon McNaught est fort, très fort même, dans l’utilisation de sa gamme chromatique et de ses aplats à l’aspect rétros et aux l’allures d’illustrations tirées des années 80. Teintes mauves et bleues, gris colorés et touches plus chaudes d’orangées et de vermillon forment une palette adéquate pour cette saison oscillant entre les derniers chauds rayons du soleil estival et les neiges ouatées de l’hiver qui arrive. Les jeux de plein et de vide ainsi que l’utilisation du clair-obscur renforcent le caractère narratif basé sur l’image pure qui se suffit à elle-même.

image jon macnaught autonme

Les traits des personnages et ceux des animaux, ainsi que les décors sont minimalistes et tout en rondeur: l’élégance graphique est là, il n’y a pas de doute. Cependant Jon McNaught ne se contente pas de créer une oeuvre juste belle, il crée une oeuvre possédant une dimension certaine de critique sociale et de remise en question: derrière ces deux historiettes sans prétention beaucoup de choses sont véhiculées: le rapport à la mort, sa banalisation, l’oubli des belles choses pour l’attrait de celles plus compliquées et résolument virtuelles, le sable du temps qui nous glisse entre les doigts sans qu’on n’y prête garde.

C’est une oeuvre contemplative, calme et pourtant lourde de sens sur la vie qui s’écoule avec poésie et tristesse pour mener à l’unique fin promise à toute chose. Mais la force déployée par l’auteur de transformer des petits riens en moments de joie laisse entrevoir une lueur d’espoir, comme le rayon de soleil qui persiste à nous réchauffer pendant que l’Automne s’installe.

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Editions Dargaud
64 pages
Caroline

À propos Caroline

Chroniqueuse

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