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Mort aux grands ! Pierre Léauté

Augustin Petit est le petit dernier d’une grande famille de Normands. Grande par le nombre, un peu, et par la taille surtout.
Lui, Augustin, bas de hauteur et frêle d’épaisseur, garde et ressasse les moqueries, les coups bas et les dénigrements. Quand la guerre est déclarée, en 1914, ses frères, tous très courageux, s’enfuient, se blessent ou sont déclarés fous. Seul représentant de la famille apte à aller combattre pour la France et l’honneur des Petit, Augustin part, le sac au dos et les godillots aux pieds, dans les tranchées. Il y vivra l’angoisse des soldats dans ces lieux putrides et terrifiants, sous les balles et canons allemands, mais aussi, il en a l’habitude, les railleries de ses camarades plus allongés que lui.
Un coup de veine monstrueux lui sauve la vie, bien qu’il y laisse un œil, et notre soldat vivra la fin de la guerre sur un lit d’hôpital. C’est là, l’orbite vide et le cœur serré, qu’il apprendra la défaite de la France et les conditions inacceptables de l’armistice.
Outré, ulcéré et blessé au plus profond de son petit cœur de patriote, Augustin, après un détour par le village familial, va partir à l’assaut de Paris et tenter de faire entendre au bon peuple de France la seule vérité de cette humiliante défaite : le gouvernement des grands. Échassiers, grandes gigues et autres asperges se considèrent comme puissants et supérieur de par leur taille et s’arrogent donc les pouvoirs. Mais Augustin lui, le sait. C’est leur faute si la France est au fond du trou. La faute des grands. Et encore plus s’ils sont blonds, tiens.

Le Peuple de Mü continue à nous proposer de jeunes auteurs originaux et talentueux. Pierre Léauté livre avec Mort aux grands une uchronie drôle et efficace, bourrée de références historiques et contemporaines : il n’est pas dit qu’ Augustin Petit porte bien la moustache en brosse, mais il est sûr qu’il est borgne !

« Offusqué, l’Auvergnat me prit comme témoin.
-Ah ben moi je suis désolé, mais Culottes d’Acier ça passe pas. Vous savez pas la dernière ? Les communistes les tabassent dans les couilles maintenant !
-Parce que vous n’êtes pas foutu de me payer trois munitions ! Gueula Gernot. Non mais alors où on va là, hein ? Où on va ?
Un long silence tomba. Jusqu’à ce que l’Auvergnat lève le doigt en l’air.
-Non mais faut arrêter avec cette histoire de culottes. Moi je verrai bien des bérets bleus, blanc et rouge. C’est à la fois quelque chose de coquet et de très seyant.
-Vous, vous êtes un fin stratège, Monsieur le bistrotier. Et le camouflage, ça vous parle ou vous faites exprès d’être con ? »

Je vous laisserai le plaisir de découvrir les références à la pop culture , tellement celles-ci sont à se tordre.
Mais là où Léauté fait preuve de talent, c’est que nous ne sommes pas non plus dans une parodie. Si certains personnages, franchement cons et boulets, nous fendent bien la poire, son Augustin Petit reste lui très irritant et inquiétant tout à long,et le parallèle avec les années trente et la vie du nabot moustachu d’outre-Rhin extrêmement bien fait. Sa propagande anti-grands/blonds, risible et ridicule
montre bien de quelle manière un peuple perdu et aux abois peut se laisser entraîner vers les pires absurdités, sans y réfléchir à deux fois et sans y trouver à redire.

Drôle, malin et quelque peu inquiétant par moment, le roman de Pierre Léauté se lit avec un grand plaisir, entre grosses blagues et inquiétude.
Vivement la suite !

Mort aux grands !Le Peuple de Mü
144 pages

Disponible en version papier et numérique

Marcelline

À propos Marcelline

Chroniqueuse/Co-Fondatrice

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2 Commentaires

  1. Bonjour, je découvre ce blog grâce à Cécile Ama Courtois qui me l’a suggéré sur Facebook.
    Ce roman m’a l’air original ! Pour le moment, je n’ai pas l’envie de me lancer dans un récit sur la guerre, mais je note pour quand ça reviendra :-).

    • Le livre est plus centré sur la progression d’Augustin Petit et de ses idées pour le moins absurdes et abjectes que sur la guerre, qui n’est vraiment présente qu’au début. En tout cas je ne peux que vous le conseiller, quand l’envie vous en dira !

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