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Annick Morard – Ourod

Annick Morard, après un premier livre sur l’émigration russe à Paris durant l’entre-deux-guerres ( de l’émigré au déraciné, l’Âge de l’homme, 2010) revient avec « Ourod, autopsie culturelle des monstres en Russie » chez les éditions de la Baconnière.
L’auteure, spécialiste de la littérature et culture Russe, est chercheuse associée à l’Institut de Littérature russe (Maison de Pouchkine) à Saint Petersbourg et maitre-assistante/ chargée de cours à l’Université de Genève.

Ourod, apprenons nous au début de cet essai, c’est le monstre en russe. Plus précisément l’Ourod est un individu frappé par une malformation importante, « monstrueuse », ou une personne laide. Il s’agit ici d’un terme à connotation péjoratif. Mais l’Ourod s’est aussi devenu ces « monstres de foire », les «  Freaks » des freaks show. Des personnes difformes ou ayant des malformations, des problèmes de pilosité, etc… Géant, femme à barbe, nain, mains à six doigts, homme intégralement poilu, siamois, etc.etc….

Mais l’Ourod pris naissance bien avant, vers le XVII – XVIIIe siècle avec tout d’abord les « Louboks » , qui étaient des sortes de prospectus d’illustration, montrant des « monstres », mais surtout sous l’égide de Pierre le Grand et son goût pour la connaissance, la découverte et la science qui créa la « Kunstkamera » qui était une sorte de musée/palais des découvertes/cabinet des curiosités. Un lieu où était exposé et étudié toutes sortes d’étrangetés vivantes ou mortes, humaines ou animales.

A ceci près, qu’idéologiquement, Pierre le Grand avait un regard plus sympathique sur les « Ourods » cherchant d’avantage à les éloigner du monstrueux et les stigmatiser pour la « beauté de leur différence ».

Avec pour point de départ historique, une époque précise, Annick Morard s’intéresse ici à la perception, et la répercussion de la figure du monstre dans la culture Russe. Questionnant  le regard de l’artiste et du spectateur, et par ce truchement notre regard sur ces « Ourod » que l’on nous cache dans notre société actuelle au lieu de les intégrer pleinement.

De l’appropriation littéraire à la culture populaire moderne, l’auteure questionne sur le monstrueux et ce que le terme désigne avec le temps. Le monstrueux étant changeant et souvent en réaction à notre époque, par exemple, les mutilés des grandes guerres ont été les “Ourod” de cette période, etc… C’est un miroir tendu sur notre société et les métamorphoses idéalisées, fantasmées et ratées.

Ourod est un essai qui se lit comme un roman, il y a une belle qualité d’écriture et un souci du rythme qui permet d’apprécier l’énorme travail de recherche et d’analyse de l’auteure. Entièrement sourcé et agrémenté de quarante-six illustrations, « Ourod, autopsie culturelle des monstres en Russie » est un beau témoignage sur la diversité et la différence et que « l’homo-sovieticus » et par extension l’homme moderne toute nationalité confondu à tendance à vouloir cacher et effacer au risque de s’aliéner.

Une réussite totale !

Les éditions de la Baconnière
303 pages,
Ted.

À propos Ted

Fondateur, Chroniqueur

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