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Giovanni Orelli- Les myrtilles de Moléson

Composé de neuf nouvelles aux allures de fables philosophiques, Les myrtilles de Moléson est le dernier ouvrage en prose de Giovanni Orelli, auteur, professeur des écoles et amoureux des mots et des langues.

S’y trouve des bribes de son passé d’écolier dans un collège de bonnes soeurs aux pieds de ce sommet du canton de Fribourg, le rire tonitruant d’un certain Severino, enjambant les crevasses des montagnes et des repas mondains, et les réflexions philosophiques d’un veau. Les thématiques chères au romancier autour des trois temporalités de la condition humaine, du monde paysan ou encore des animaux sont ici agrémentées de commentaires et de citations qui nous plongent encore plus dans cette lecture bondissante et parfois surréaliste.

Giovanni Orelli est un érudit, se passionnant pour les mots, leur sens et leur sonorité. Il joue avec la ressemblance souvent trompeuse entre un même terme dans deux langues différentes, compose avec la dureté ou la douceur d’une lettre, lui qui a passé une partie de sa petite enfance au coeur d’un petit canton, avec son dialecte tessinois aux oreilles et dans la bouche. 

” L’idée du fils prodigue m’est venue depuis bien longtemps, dis le veau maigre, mais c’est une chose irréalisable pour des veaux comme nous. Le fils prodigue, en quittant sa maison, avait empoché sa part, autrement dit, il avait les poches pleines d’argent, et, pour cette raison suffisante, il était accueilli par tous à bras ouverts. Un veau gras, lui, n’emporte que sa graisse. Non seulement il n’a pas un centime en poche, mais il n’a pas de poche du tout. “

Notamment dans son texte Alphabet où il s’amuse à créer une comptine de Noël avec les quatorze lettres sur vingt-et-une apprises et connues par ses élèves. Il jongle avec les rimes, pique et coud, taille et réduit le nombre de lettres utilisées jusqu’à n’avoir plus que l’essence même de son texte initial. Un tour de force que l’on sent réalisé avec plaisir englobant tout le cycle d’une vie en seulement six mots et septs lettres.

Vero     Vrai

rive        rives

neve        neige

beve         il boit

vive       il vit

Nero.      noir.

Il y a également Carnaval comme en Chaldée, où hommes et animaux voient leurs enveloppes charnelles s’inversées. Voilà que la plus ambitieuses des taupes devient première citoyenne de leur toute nouvelle ville, Rosalba, et que les néo-humains découvrent avec plaisir les conforts du monde moderne, y compris l’Anisette, la Bergamote ou bien le Marasquin. Un conte aussi drôle que philosophique.

Les nouvelles des Myrtilles de Moléson sont autant de contes modernes où les alpages suisses dessinent leurs lignes douces, au rythme des fêtes où les oies et les veaux gras font le bonheur des panses et des esprits. Les hommes et femmes qui naviguent dans ces textes, qu’ils soient paysans, bourgeois, religieux, dressent le portrait de toute une époque à présent disparue dont l’auteur évoque le souvenir avec beaucoup de coeur.

Ce recueil est d’une écriture riche, à la traduction très subtile de Renato Weber, où on lit l’évocation de la simplicité d’un rire, le souvenir adolescent d’une cueillette de myrtilles. C’est une très belle ode au temps qui passe et à un temps passé, par ce très grand poète et nouvelliste qu’est Giovanni Orelli.

Le silence de l’attente : une lettre par mois dans le meilleur des cas, parce que les paysans sont forts pour travailler la terre, faucher, traire, tailler les arbres, ils sont forts pour plein de travaux, je n’en finirais plus. D’écrire des lettres, non, ce n’est pas leur fort. Comme elles me regardent, ces mères, avec leur espoir affamé d’espoir.

Giovanni Orelli Les myrtilles de Moléson Image

Éditions La Baconnière
Traduit de l’italien (Suisse) par Renato Weber
131 pages
Caroline

À propos Caroline

Chroniqueuse

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