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L’adjacent – Christopher Priest

Tibor Tarent est photographe free-lance. Il a quitté la République Islamique de Grande-Bretagne pour suivre sa femme, Melanie, partie comme infirmière avec MSF. Destination l’Anatolie. Quitter le climat changeant et déstructuré de l’Europe pour l’aridité et la dureté de l’Asie mineure. Mais la vie n’y est pas simple et le couple se distend. Avant que l’un ou l’autre ne prenne une décision, Melanie disparaît dans un attentat. Disparaît, c’est le mot. Son corps est introuvable et la zone dans laquelle elle se tenait n’est plus qu’une zone noire, vide et triangulaire. Il est rapatrié en RIGB, où il apprend avec stupeur que Londres a été dévastée en partie par un attentat d’une violence rare, qui a laissé place à une zone noire, vide. En forme de triangle parfaitement équilatéral.

Tom est un illusionniste d’une cinquantaine d’années, et la surprise laisse place à l’enthousiasme lorsque l’état-major du Royaume-Uni lui propose de rejoindre les tranchées françaises pour servir, d’une manière ou d’une autre, l’effort de guerre. C’est un périple étrange et déroutant qu’il fera, à la découverte de cette guerre immobile, lointaine et pourtant si terrifiante, qui le frappera en pleine face.

Mike Torrance, lui, est gazier instruments sur une base aérienne en Angleterre. Il répare les avions, des Lancaster surtout, qui tentent de mettre en déroute les armées nazies en cette année 1943. Alors qu’il répare un avion nouvellement arrivé à la base, il va faire une découverte qui va à la fois le transcender et le laisser complètement démuni…

« Une autre façon d’induire le public en erreur est de faire appel à l’adjacence »

En ai-je déjà trop dit ? Ou pas assez ? Il est toujours difficile de parler d’un livre de Christopher Priest. L’homme est passé maître dans l’art du jeu narratif, de l’illusion et du retournement. Aucune certitude ne le reste bien longtemps, car le magicien Priest sait très bien où il veut nous emmener et comment nous perdre sur le chemin. Mais aucune route n’est anodine, et la traversée est de plus en plus époustouflante au fil des pages. On croit comprendre, on imagine et on se dit  qu’il ne nous aura pas, cette fois on sait ! Et la partie suivante nous replonge dans la perplexité la plus totale, brisant notre assurance et nous transportant sur une piste autre. Adjacente. Pas si éloignée, mais qu’on ne percevait pas forcément auparavant.
On retrouve dans ce livre tous les thèmes chers à Priest, les avions, la guerre, le dérèglement climatique, l’illusion, la perception… Mais L’adjacent en est le summum. C’est en même temps un résumé de son œuvre, et tout autant un roman complètement original. Christopher Priest nous raconte sans doute la plus belle des histoires avec une virtuosité folle, un sens du détail incroyable et une pincée d’humour, juste ce qu’il faut (on notera avec délectation le nom des tempêtes tempérées qui sévissent en Europe !). Roman fait de miroirs déformants, jouant comme de juste avec notre perception, il se dissimule et s’imbrique, se tisse et s’enroule dans l’espace, le temps et les à-côtés. Il nous feinte, se joue de nous avec brio, démontrant, s’il était encore nécessaire, quel grand écrivain, quel grand magicien est Christopher Priest.
C’est un roman à reprendre à l’aune de sa première découverte, des autres œuvres de Priest, et qui j’en suis sûre aura encore de quoi nous éblouir. Faut-il le dire ? Un roman exceptionnel !

Pour en savoir plus sur l’auteur, vous pouvez lire ou relire son interview parue en 2014 sur le site !

l'adjacent couv552 pages
Denoël Lunes d’encre
Traduit de l’anglais par Jacques Collin

Marcelline

À propos Marcelline

Chroniqueuse/Co-Fondatrice

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