Maurice Pons aime aller travailler dans sa maison de Jouff, dans une campagne paisible où il a ses habitudes.
Dans ce petit village, où tous se connaissent et où tout se sait, il se dit d’étranges choses sur Mademoiselle B., une femme sans âge, vêtue de blanc des pieds au bout des gants. Elle séduit et entraîne les hommes chez elle, et ceux-là sont retrouvés morts, suicidés, quelques temps plus tard, inévitablement. Chacun sait le lien qui unit ces morts à cette femme mais personne, gendarme ou curé, ne veut s’en approcher. Maurice Pons, lui, touché par ces pendus et ces noyés et intrigué par l’aura de mystère que laisse derrière elle Mademoiselle B., va mener l’enquête.
Si Les saisons est considéré comme le chef d’œuvre de Maurice Pons (et je n’oserai dire le contraire), il gravite autour de ce livre une quantité d’autres comme autant d’étoiles dans la tapisserie du ciel Pons. Mademoiselle B. est l’une de ces étoiles, une un peu noire, un peu étrange, qui lance un rayon d’attraction et laisse sur le carreau, terrassé.
Mademoiselle B. lie mystère, fantastique, fantasmes et violence, et fait passer le lecteur par toutes les émotions possibles. On rit souvent, de certaines situations que Pons tourne et détourne pour nous prendre au dépourvu, d’anecdotes qui pointillent le roman, pour mieux passer d’un coup à une scène glauque, angoissante, mystérieuse. Car Pons, on le sait notamment grâce aux Saisons, excelle dans la description de la mort, de blessures et de la déchéance. Et la vampire de Jouff laisse sur sa piste son lot de cadavres, accrochés à la plus haute branche d’un arbre en lisière de forêt ou repêchés de la rivière, bleus, gonflés et mordillés par les poissons, ainsi qu’un fumet de sexe et de séduction presque pervers, malsain mais irrésistible. On suit avec entrain Maurice Pons le narrateur dans cette enquête, avec amusement et une curiosité un peu malsaine. On aime de plus en plus ce personnage, sorte de détective amateur, sympathique, piquant et passionnant, son ex-femme, son amante, son fils qui passe de temps en temps sur sa moto, ses petites habitudes… On ne le lâche plus, aimanté nous aussi par le charme et l’ombre de Mademoiselle B.
La chute n’en sera que plus dure, d’une violence qui vous laisse en boule, prostré et terrifié.
On ne dira jamais assez quel grand auteur est Maurice Pons, qu’il faut toujours aborder ses livres avec précaution, même si l’on sait que rien n’y fera, la plongée sera totale et l’on en ressortira autre, plus humain.
281 pages
Folio
Marcelline