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Barbara Balzerani – Camarade Lune

« Tout a commencé par hasard »

Et le hasard fait bien les choses pour nous lecteurs !

Il est toujours délicat d’aborder et donner un avis sur un roman autobiographique. Il y a forcément un parti pris, une obsession propre à l’auteur exacerbée par les mots, une relecture de ses propres maux à travers un prisme tout personnel et qui ne donnera que le point de vu du narrateur. Cela transporte souvent, choque parfois, voir amuse quelques fois. L’authenticité et la sincérité font force dans ce genre de récit la plupart du temps, mais le vécu de l’écrivain et surtout le ressenti peuvent-être par moment très mal retranscrit et n’offrir finalement guère plus qu’un enchainement de tranches de vie que l’on a vite oubliées.

Barbara Balzerani, elle, défit cette logique, entrainant le lecteur vers des rivages qu’il a peu l’habitude d’apercevoir. Son récit âpre et sombre est autant une déclaration d’amour à l’écriture qu’une quête de reconstruction de l’identité. À travers son texte nous plongeons dans les limbes, les siennes, parcourant son vécu, affrontant la multiplicité de réflexions et d’analyses quant à son passé et son présent. De la difficulté de renaitre autrement que comme elle est perçu par la population et son gouvernement à celle d’apprendre de ses erreurs et changer à travers l’écriture. Un chemin de croix rempli de fêlures et de colère qui vont devenir le terreau d’une seconde vie.

Enfant de la campagne dans une Italie appauvrie, grandissant à l’ombre de l’usine du coin, son père humilié par un licenciement, le rapport compliqué avec ses parents, les choses que l’on n’ose pas se dire en famille, ce que l’on ne peut pas dire aussi. Puis la fuite vers un potentiel avenir meilleur, l’envie de changer, de changer les choses, de se trouver une cause à défendre. Mais c’est surtout l’Italie des Brigades Rouges, de son rôle dans cette équipée « sauvage », et l’emprisonnement ! Un parcours tortueux qui va laisser des traces.

Ce qui traverse le texte de part et d’autre est cette perpétuelle quête d’identité, le sentiment que l’auteur n’est pas dans son monde, ne vit pas à la bonne époque, ne comprend pas l’Italie dans laquelle elle vit, ne se connaît pas tout simplement et cherche sa place à travers l’approbation d’autrui. De son propre aveu :

« Mais ça, c’est déjà aujourd’hui. Ce que l’on ne peut pas encore raconter. J’ai encore trop à faire pour pouvoir recomposer avec les fragments du miroir une image de moi qui s’est brisée dans la recherche effrénée de l’approbation et de la bienveillance d’autrui. Et maintenant que la fin a ruiné tant de certitudes, ce qui reste le plus important, ce sont les comment. Dans les échos d’un grand vide »

En introduction je parlais de la difficulté de donné un avis sur ce genre de texte. Le parti pris de l’auteur est tel que l’on adhère totalement ou pas du tout. La demi-mesure n’existe que trop rarement, tant le vécu et la sincérité transpire à travers les mots. Camarade Lune fait très certainement parti de ces quelques textes autobiographiques qui transcendent cette simple condition « d’œuvre » pour venir résonner en nous et nous apporter une vérité à grand coup de poing. C’est fort et poignant, souvent amer, mais la sincérité qui émane de ce texte reste gravé en nous bien longtemps après avoir refermé le livre.

« Faire la révolution pour changer le monde ne m’a pas rendue heureuse »

Barbara BalzeraniEditions Cambourakis,
132 pages,
Trad. Monique Baccelli
Ted.

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À propos Ted

Fondateur, Chroniqueur

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