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Chuck Palahniuk- Damnés

Chuck Palahniuk, auteur du très célèbre Fight Club, se livre ici à l’exercice de la description des Enfers version 2014. Loin des représentations dantesques habituelles, il nous offre une visite guidée entrainante et scandaleuse, à l’aide du style pétaradant et pétulant qui lui est propre.

Madison, 13 ans et boulotte, se réveille dans une cage crasseuse au beau milieu de la géhenne. Entre le lac de vomis, les montagnes de rognures d’ongles et l’océan des couches culottes usagées, le monde inférieur est en fait l’immense décharge abandonnée de la Terre. Bien décidée à ne pas se morfondre sur son sort et entourée d’une bande d’amis marginaux, la jeune protagoniste décide de prendre son destin en main, même si cela signifie devenir télemarketrice et faire du chantage aux démons à l’aide de barres chocolatées. Car même si elle est jeune et n’a qu’une courte existence terrestre à son actif, Madison sait ce qu’elle veut et ne se laisse pas berner facilement.

Ce roman est constitué de chapitres courts, commençants chacun par un appel direct de la jeune morte à Satan, auquel s’enchaine tout un débat  et un monologue intérieur. L’auteur se reconnait à son style particulier: phrases brèves et répétitions qui jalonnent le texte, créant un fil conducteur, un choeur de fond tout en appuyant les propos de la narratrice. Les dialogues internes de celle-ci nous permettent de découvrir son passé d’enfant de stars, ses parents hippies-drogués-riches-à-l’extrême, sa ribambelle de demi-frères et soeurs adoptés à chaque sortie du dernier films de sa mère ou encore la raison de sa damnation, qui n’est finalement pas celle qu’elle croit connaitre. Le lecteur prend part à un jeu de voyeurisme en lisant les pensées intimes de Madison, et dissèque avec elle la société qui se nécrose sous un extérieur rutilant.

Tout est cliché et chaque chose est poussée à l’extrême, quitte à donner un sentiment d’absurde et de cynisme total et jubilatoire. Le lecteur est entrainé dans ce tourbillon, où les actes s’enchaînent avec un rythme effréné. Palahniuk prend un malin plaisir à passer brusquement et sans aucune mise en garde, d’une situation totalement improbable à un acte routinier de tous les jours. En effet, Madison côtoie des entités légendaires, mais ne se gène pas pour autant à leur donner une bonne leçon de morale, puis va tranquillement s’asseoir à son bureau pour interroger des personnes sur leur utilisation du fil dentaire. Journée standard en Enfer.

L’humour noir et le style décalé et séditieux de l’auteur sont autant d’ingrédients qui font de Damnés un roman qui tient en haleine et se dévore d’une traite. Impossible de s’ennuyer lors de cette critique désopilante et mordante de l’absurde incongruité du genre humain. La prose est moralement intolérable et provocatrice, la lecture jouissive et encore une fois, Chuck Palhniuk signe un roman a découvrir de tout urgence!

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Editions Sonatine
290 pages
Caroline

À propos Caroline

Chroniqueuse

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