Moïse a toujours été très réservé et bien peu démonstratif vis-à-vis de son fils. À sa mort, celui-ci découvre une série de trois carnets, dans lesquels l’écriture serrée du défunt noircit les pages de lettres réalisées à date fixe entre 1960 et 2004. Toutes sont adressées à une seule et même personne, une certaine Anne-Lise Schmitt, dont Moïse semble être le père. À travers ce monologue épistolaire, c’est toute une vie qui se dévoile, marquée par les guerres mondiales, les sacrifices et par-dessus tout, par un immense et incommensurable amour.
Son petit-fils Baptiste va alors se lancer sur les pas de l’aïeul, dans l’espoir de retrouver des fragments de son existence dans les décombres du passé. Guidé par les lettres, il souhaite ainsi recréer un lien avec son propre père, s’appuyer sur les vestiges pour reconstruire leur relation. C’est sûrement l’ultime chance offerte aux deux hommes d’enfin se parler. Afin de partager leur histoire et ne pas laisser les regrets se transformer en blessures trop profondes pour être guéries.
Se construit une danse entre présent et passé, au court de laquelle Baptiste va se heurter à de nombreux obstacles : les lieux, les hommes et les femmes d’antan ne sont plus que de vagues souvenirs, dont les descendances ont bien peu de choses à dire.
Avec Entre les lignes, Dominique Mermoux signe très belle adaptation graphique du roman Toutes les histoires d’amour du monde. Par un procédé d’ellipses temporelles marquées par une colorimétrie différente, il nous invite à découvrir la petite histoire imbriquée dans la grande. Cela parle d’amour bien sûr, d’un amour aussi magnifique que tragique. Mais surtout de l’importance de dialoguer, de conter sa vie avant qu’il ne soit trop tard. Car chaque famille possède sa part d’ombre, est hantée par les regrets des non-dits et des questions que l’on n’a pas osé poser…
Baptiste Beaulieu pratique entre autres les activités de médecin et d’écrivain, et s’applique ainsi à panser les corps et les âmes de sa poésie et de sa bienveillance. Il tourne et modèle des histoires emplies d’une humanité débordante, qui redonnent foi en l’humain·e. Dans Entre les lignes, Dominique Mermoux parvient à illustrer avec beaucoup de douceur et de finesse la quête autobiographique de l’auteur, rassemblant les fragments d’un autrefois qui trouve son écho dans nos cœurs. J’y ai vu bien plus qu’une simple adaptation, car c’est un réel hommage à la mémoire de nos pères et mères.
Voici le lien menant à la page où l’on peut trouver la description d’Anne-Lise Schmitt : #lookingforannelise
Rue de Sèvres
168 pages
Caroline