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Frank Herbert – Dune

En 2020 devait sortir l’interprétation cinématographique de Dune par Denis Villeneuve. Un projet ambitieux et une première bande annonce prometteuse. Ce film attendu au tournant, tant l’oeuvre de Frank Herbert fait parti de cette caste d’oeuvres littéraires réputées difficilement adaptables. Mais qui en plus de cela ont cette image d’oeuvres pour « initiés ». De réputation complexe, un rythme lent, une histoire dense, bénéficiant d’un lexique à part, etc…etc… Dune bénéficie de toutes les appellations possibles pour paraître inaccessible.

En tant que lecteur, je ne me suis lancé que très récemment dans le cycle d’Herbert, ayant en tête ce monument et étant intimidé par la réputation de l’œuvre. Tout comme le Moby Dick de Melville, l’Ulysse de Joyce ou encore « A la recherche du temps perdu » de Proust, Dune bénéficie d’un culte intimidant, qui pose cette barrière symbolique du lecteur de Dune/du non lecteur.

La curiosité devrait être le seul moteur et si l’on comprend mal ou peu son œuvre, d’avoir essayé de s’être forgé son propre avis, c’est la seule valeur que nous devrions prendre en compte dans notre expérience de lecteur, tant l’expérience nous fait grandir et nous construit. Se confronter à l’univers de Delillo, de Pynchon ou encore de l’ogre Vollmann est souvent ardu, mais tellement enrichissant que je ne peux que conseiller d’essayer au moins une fois dans votre expérience de lecteur. Dune de Frank Herbert, c’est exactement pareil. Oubliez l’aura, oubliez la réputation, oubliez l’image intimidante, la peur de ne pas comprendre etc… Donc oubliez, et plongez-vous dedans comme le lecteur avide de fictions, de sensations, de découvertes et passionnés que vous êtes, respectez-vous et le livre vous le rendra bien.

Le projet de Frank Herbert prit naissance en 1957 après deux expériences notables de l’auteur. Tout d’abord, il fut un temps Veilleur de feux dans une immense forêt en Oregon ou dans l’état de Washington. Un travail de vigie qui selon son éditeur le marqua et l’influença pour la conception de Dune. Puis une seconde expérience, plus directe et plus proche de son univers. Pour les besoins d’un article, qui ne fut jamais publié, il étudia durant une longue période les dunes de sables de l’Oregon. Une étude visant à déterminer si un type d’herbe planté par la main de l’homme pouvait permettre de ralentir la progression des dunes et préserver l’écosystème du secteur. Ces deux éléments, cheminant dans l’esprit fertile de Frank Herbert, le menèrent dans le système solaire Canopus, du côté de sa troisième planète, Arrakis, ou plus communément appelé Dune et que le public découvrit en 1965.

Dune se déroule en 10191 après la fondation de la Guilde Spatiale. Et il faut que je vous parle ici d’un premier élément. Il existe un élément central dans l’univers de Dune, l’humanité ayant basculé, avec le temps, vers un système de société libéro-fédéral, il existe néanmoins une grande convention. Cette dernière reposant sur trois « castes ». La Guilde étant un des trois éléments, elle a le monopole des voyages spatiaux et de la banque. Les deux autres castes étant l’école Bene Gesserit, une école réservée aux femmes, développant les aptitudes physiques et mentales. Enfin la CHOM, ou Combinat des Honnêtes Ober Marchands, qui est une compagnie marchande regroupant l’empereur ainsi que les grandes maisons de l’univers de Dune.

La grande convention et la création de ses trois castes sont intervenues après un lointain événement, qui dura 93 ans ( 201 Avant la Guilde – 108 A.G ), le Jihad Butlerien. Ce Jihad fut une croisade contre les machines pensantes et les robots conscients. Une guerre de l’homme vs. les machines. Ce qui fait que l’univers de Dune, en 10191 après la fondation de la Guilde, a interdit l’utilisation de robots pensants et d’arme puissante, atomique ou bactériologique.

Dernier point important, pour rentrer dans l’univers. L’épice, que l’on trouve exclusivement sur Arrakis/Dune, est un enjeu commerciale et de pouvoir majeur. De par sa rareté (une seule planète en produit, oui) et de part ce qu’elle apporte, la production est sous l’étroite surveillance de l’empereur qui place durant une période une des grandes maison sur Arrakis afin de veiller à l’exploitation de cet élément. Cette épice ayant des propriétés importantes et recherchées, apportant la prescience pour certains, notamment les navigateurs de la guilde, ou encore offrant des qualités gériatriques, vous l’aurez compris, l’épice est centrale.

Donc en 10191, après un long règne de la maison Harkonnen sur Arrakis, est nommé une autre grande maison, celle du Duc Leto Atréides. Une transition est mise en place qui agace le Baron Harkonnen et qui se trouve être le sujet de tension entre les deux cousins ( le baron et le duc). Accompagné de sa famille, Jessica, sa compagne et Bene Gesserit et de leur fils Paul, un enfant aux aptitudes assez particulières pour un être humain de sexe masculin. Ainsi que par sa garde, son médecin et son armé, la maison Atréides s’installe sur Dune pour prendre la relève et reprendre l’exploitation de l’épice. Un complot fomenté par le Baron Harkonnen va permettre de tuer le Duc et d’éliminer les gardes et l’armée des Atréides. Néanmoins, Paul et Jessica vont réussir s’en sortir en s’échappant dans le désert. Un désert hostile, aride et surtout habité par le “Shai-Hulud” ou ver des sables et un peuple ( libre) des sables, les Fremens. Ce dernier, le peuple, finissant par accepter Paul et sa mère en son sein, et voyant en Paul le « Lisan Al-Gaib » ou prophète étranger d’une vieille légende Fremen.

Comme je disais en introduction oubliez les avis, oubliez la réputation, acceptez d’entrer dans ce roman, et peut-être ce cycle, si d’aventure vous aimez, mais surtout laissez-vous porter.

Il est intéressant de lire, en 2021, l’œuvre de Frank Herbert, tant les sujets, notamment l’écologie, sont actuels. La pertinence et la finesse du propos de l’auteur apportant un tout fin et intelligent faisant profondément écho et souvent contrepoint avec notre époque. Notamment chez le peuple Fremen, les habitants du désert, qui vivent en symbiose avec l’environnement aride et ont appris à préserver l’eau, y compris celle du corps, car ici, l’eau est sacrée. Mais Frank Herbert ne se limite pas qu’à l’écologie, la mystique et la spiritualité ayant une place importante dans l’oeuvre. Ainsi, toujours dans l’exemple des Fremens, l’eau ou l’épice bénéficient de cultes, de croyances, etc…

Frank Herbert, a écrit à travers Dune un cycle « Monde », tout ou presque est pensé, ainsi l’univers est d’une vraisemblance incroyable et très rarement vu ( chez Tolkien ou Ursula K Le Guin, et certainement chez deux trois autres auteurs que je ne connais pas), le moindre détail a son histoire, son utilité, et ainsi plonger dans l’univers de Dune c’est un peu ce que pourrait vivre un anthropologue découvrant une nouvelle tribu. Nous ne faisons pas que découvrir un roman de Science-fiction, nous découvrons aussi un peuple, des familles, un empereur, des rites, des croyances, des codes de société, des langages. Etc… C’est d’une richesse incroyable.

Comprenez par là et pour faire écho à mon propos du début. Oser s’aventurer dans l’univers de Dune, lire ne serait-ce que le premier tome, c’est être, in fine, récompensé au centuple par l’auteur. Dune, c’est une expérience, il n’y a pas vraiment de comparatif selon moi.

Alors certes, on pourra lui reprocher certaines approches, fruit de son époque, ou ce côté féodal dans l’organisation des maisons, d’un empereur, de castes, etc… Mais une fois le contrat de suspension consentie de l’incrédulité passé avec l’auteur, c’est un voyage incroyablement dense et riche.

 

J’ai essayé de faire cours ici, de partager mon expérience, et aussi simplement que possible de vous donner envie de lire Dune. Cette année, et en attendant la vision de l’œuvre par Denis Villeneuve, sur le webzine, nous allons parler du cycle en abordant chaque tome. Ainsi, je vous retrouve le mois prochain pour « Le Messie de Dune ».

À noter : pour les cinquante ans de l’œuvre, l’éditeur historique de Dune, a réédité l’œuvre en grand format dans une édition du cinquantenaire limitée et magnifique ( la photo en en-tête, avec une couverture par Alex Trochut), ainsi qu’une seconde version avec une couverture dessiné par d’Aurélien Police ( le visuel ici).

Éditions Robert Laffont,
traduction Michel Demuth,
690 pages,
préface de Denis Villeneuve et Pierre Bordage,
Postface de Gérard Klein

Ted

À propos Ted

Fondateur, Chroniqueur

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2 Commentaires

  1. Merci pour ce superbe article ! Passionnant !

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