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Hamdy El-Gazzar- Aux femmes

Les Editions Belleville continuent leur tour du monde des pépites littéraires en ramenant cette fois-ci dans leur valise un petit trésor élu meilleur roman égyptien en 2014: Aux femmes d’ Hamdy El-Gazzar.

Nous y entendons la voix de Saïd, enfant d’un quartier populaire du Caire prés de la mosquée Ibn Touloun, fils du menuisier Batta reconnu par tous et de l’intransigeante mais juste Zoubida. Au fil des pages, Saïd grandi, gravi les marches de l’école primaire puis pousse les portes de la faculté, toujours en élève appliqué et sérieux. Mais c’est surtout son apprentissage des femmes qu’ Hamdy El-Gazzar raconte, un apprentissage respectueux et timide, parfois maladroit, de ces figures féminines qui gravitent autour de lui et dont il tente de saisir l’attention et le mystère. De la très chère amie de sa mère, Rouhayya la vieille fille confectionnant des robes tapageuses et envoûtantes de danseuses, à Louza la femme du marchand de fruits, à la beauté folle qui attire tous les regards mais pas les faveurs de son propre époux, en passant par Hafsa qui s’immerge et s’enferme dans la religion, toutes font partie de la vie de Saïd, le modèlent et font de lui ce qu’il est.

Figures poétiques, nébuleuses et insaisissables à l’image de celle qui illustre ce roman d’ Hamdy El-Gazzar, les égéries féminines sont issues de tout bord et vont éveiller un amour d’enfant, d’adolescent et d’adulte dans le coeur du narrateur. Un amour souvent maladroit et tâtonnant qui le relègue trop souvent au rang d’ami très proche ou de confident favori. Saïd se lie d’amitié avec Saha la japonaise studieuse, Maria l’américaine passionnée de danse orientale, Rim qui lui accorde la douceur de ses baisers mais lui interdit la passion de ses caresses… Il découvre les particularité de chacune et les accepte, aimant les femmes d’un sentiment amical ou passionnel mais les respectants toujours.

Le désir dans un corps, comme on le sait, est comme ce serpent aux belles couleurs qui rode dans la chambre: il se dissimule, il se cache parmi les meubles et les objets, il disparaît à la vue, mais il progresse, il avance toujours. En est-on conscient?
Le désir est séduisant, c’est un serpent aux milles couleurs qui étincelle, qui se déplace avec lenteur, et s’approche; on veut l’attirer, on tend vers lui une main innocente, on caresse son corps, ses cheveux, sa tête; on est grisé, le plaisir nous prend, on n’est plus sois-même, avec lui on se perd dans la volupté, pour une seconde, quelques minutes. Et puis la volupté n’est plus, on souffre, on est meurtri. Quand on approche sa bouche, il mord. Il mord cruellement, crache son venin. Le désir ne connaît pas ce que l’on nomme amour.

Dans ce roman, le héros se heurte à différents seuils d’incompréhensions dont certain parfois dus à des cultures différentes, ayant une manière de communiquer ou d’interpréter les signaux qui mèneront à des quiproquos laissant Saïd seul de nouveau. Ce confident proche semble considéré comme asexué par ces filles qui gravitent autour de lui et celles qui le marqueront le plus ne seront pas celles qu’il parviendra à conquérir corps et âme.
Il sera aussi tenaillé entre le devoir du père, la fierté et le devoir déposés sur ses épaules par ses parents et par la société elle-même. Fils d’un menuisier reconnu et aimé, il choisira pourtant la voie de la philosophie et de l’enseignement, faisant opposition au travail physique par le travail intellectuel.

Un chapitre pour une femme, une véritable déclaration d’amour que fait Hamdy El-Gazzar dans Aux femmes, une déclaration tendre et pudique, délibérément teintée de féminisme. Les questionnements qui jalonnent ce récit d’apprentissage dressent une étude sociologique de l’Egypte entre 1975 et 1999, marqué par un contexte géopolitique fort, et des êtres humains évoluants dans un quotidien baigné par la religion et les traditions, à travers le parcours d’une vie d’un homme fasciné et façonné par les femmes qui l’entourent.

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Et à présent il faut que je rencontre mon amour, l’amour de ma vie, la femme de mon imagination et celle qui sera mienne. Cela ne s’est pas encore produit et je suis toujours à attendre son apparition, sa venue; j’aspire à la voir, je rêve qu’elle est là. Je suis toujours à vouloir aimer.

 

Belleville Editions
256 pages
Traduit de l’arabe (Egypte) par Françoise Neyrod
Caroline

À propos Caroline

Chroniqueuse

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