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Hiroko Oyamada – L’Usine

L’Usine est le premier roman de l’autrice Hiroko Oyamada. Autrice s’intéressant à l’étrange dans le quotidien et au surgissement de ce dernier, elle offre un univers à la croisée des chemins de plusieurs courant littéraires. Nous pourrions citer Kafka pour son évidente parenté, mais également des auteurs plus contemporain tel de David Foster Wallace.

« Concernant le temps, ce n’es pas un problème. Progressez à votre rythme, monsieur Furufué, en fonction de ce qui vous paraît possible. Personne ne vous fixera une date limite ou quoi que ce soit de cet ordre. »

Trois personnes, deux hommes, une femme se retrouvent embauchés dans l’Usine. Un immense complexe industriel, aussi grand qu’une ville, qui n’offre rien d’autre à l’horizon. Une vie dans cette usine établie avec dortoirs, restaurants, et même des espèces animales endémiques. Mais retrouvons les trois protagonistes que nous suivons dans cette étrange histoire et qui se retrouvent affectés à des tâches aussi rébarbatives qu’originales. L’usine petit à petit s’impose dans leurs vies, dans leurs quotidiens, dans leurs êtres, pour finalement les changer à jamais.

Tout n’est qu’apparence, l’absurdité est non dite, mais largement ressenti, la répétitivité et l’ennui des compagnes d’un quotidien lisse et aseptisé. Tout est là pour démontrer une norme, un cadre, une condition, inextricable, un modèle de société qui doit tourner coûte que coûte, et c’est là que le vernis craque.

Se jouer du symbolisme pour dire les maux de notre société. C’est par cet astucieux jeu de dupes et d’ombres qu’Oyamada construit un portrait à l’acide et faussement lissé du monde contemporain. L’usine en figure tentaculaire, ayant droit de vie et de mort, mais surtout d’aliénation sur les individus, poussant jusqu’au changement les plus concrets pour certains.

L’usine, d’Hiroko Oyamada, par son apparente simplicité et innocence convoque la figure du conte moderne, mais lorgne aussi du côté de certains auteurs américain moderne comme David Foster Wallace ou encore John Cheever dans cet esthétisme lisse et creux. Un conte qui badine autant qu’il titille en fausse innocence là où l’on ne s’y attend pas.

« Je m’en suis aperçu en ouvrant les yeux ; je croyais être en train de lire un texte absolument incompréhensible, mais en fait, c’était moi qui dormais. À peine avais-je le temps de me dire que j’avais sommeil, que je m’assoupissais. Et apparemment, il m’arrivait même de rêver. J’avais encore les ombres de choses noires devant les yeux. J’ai regardé précipitamment autour de moi, mais grâce aux cloisons amovibles qui ont fait leur apparition ce matin, personne ne semble m’avoir vu. »

À ce titre le final d’une banalité confondante mais d’une profondeur et d’une violence psychologique fine et pertinente conclu à merveille ce récit ô combien précieux pour comprendre notre monde et les politiques libérales.

Un titre indispensable en cette rentrée littéraire de 2021 remplit d’incertitude, mais offrant néanmoins de belle rencontre comme cette étrange Usine d’Hiroko Oyamada.

Christian Bougois éditeur,
Trad. Sylvain Chupin,
186 pages,

Ted.

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Fondateur, Chroniqueur

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