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Treasure Island – Robert Louis Stevenson

Treasure Island (L’Île au Trésor) est un roman de Robert Louis Stevenson, publié au complet en 1883 après sa parution en épisodes dans le magasine Young Folks.

C’est l’été, il fait beau, quel meilleur moment pour lire L’Île au Trésor ? En effet, il s’agit d’un roman court, rempli d’action et au rythme effréné, le roman idéal à lire sur la plage où sur votre terrasse. Si vous aviez promis de vous lancer dans la lectures de quelques oeuvres en anglais pendant l’été, vous pouvez également commencer avec L’Île au Trésor : le style est simple et l’action est aisée à comprendre, même dans sa langue originale.

En avant toute pour L’Île au Trésor ! Mais d’abord, chers aventuriers, n’oubliez pas d’inclure dans vos valises quelques éléments essentiels (votre humble narratrice espère que vous appréciez ses efforts pour avoir l’air enjouée et enthousiaste : en réalité, elle ne serait pas aussi énergique à l’idée de se lancer dans une aventure telle que les personnages s’apprêtent à vivre)

  • Une certaine connaissance du vocabulaire marin serait utile. Ce n’est pas essentiel mais Stevenson montre une ample connaissance des navires et déploie le vocabulaire approprié à la description des voiles, des bouts (ce que nous, pauvres profanes, appelons des cordes) et d’autres particularités de la vie en mer. Il parle également des vagues, du vent, des courants marins… Bref, si vous voyez un terme qui vous échappe, n’hésitez pas à le rechercher tout de suite et, si vous en avez la patience, à vous faire une petite fiche spécialement pour ces termes. Si vous avez lu Moby-Dick, vous avez tous les termes qu’il vous faut, si vous comptez lire Moby-Dick, cette fiche sera très utile.
  • Ce n’est pas nécéssaire, mais Stevenson a écrit un article intitulé “My first book – Treasure Island” pour McClure’s Magazine en 1894 dans lequel il aborde la genèse de son premier roman complété. C’est un article de quelques pages dans lequel il raconte qu’il a écrit son célèbre roman à partir d’une carte qu’il avait dessinée, au hasard, alors qu’il était en convalescence, en compagnie d’un garçon à l’imagination débordante. Stevenson y révèle le premier titre du roman : Sea Cook (Cuistot de mer, les anglais marquent nettement la différence entre le chef à terre et le cuistot en mer) en référence à Long John Silver, introduisant cet intriguant personnage dès le titre au lieu d’attendre patiemment le milieu de l’intrigue pour nous le dévoiler comme il le fait dans le roman renommé L’Île au Trésor. Stevenson évoque très brièvement les étapes de la création de son personnage désormais mythique, Long John Silver. Il est tout à fait passionnant de voir avec quelle attitude candide l’auteur traite son intriguant personnage sans savoir, bien évidemment, que celui-ci allait devenir l’avatar de la piraterie pour les siècles à venir. L’intérêt, selon votre humble narratrice, de revenir à des romans classiques, tels que l’Île au Trésor, est de découvrir d’où viennent les images que nous consommons et d’observer à quel point le temps les a changées.
  • Cet article est non seulement une riche source d’information, mais un très bon moyen de se ‘mettre dans l’ambiance’ du roman, si votre humble narratrice peut se le permettre. Stevenson y exprime l’enthousiasme qu’il a ressenti en créant la carte et les personnages et en écrivant les dix-sept chapitres du roman. Dans cet article, vous pouvez voir cette passion pour l’aventure qui s’est réveillée en lui et en ses lecteurs et avoir un avant-goût de ce qui vous attend. Votre humble narratrice est extrêmement fascinée par Stevenson, l’auteur de Treasure Island et de Strange Case of Dr Jekyll and Mr Hyde, deux romans si différents qu’ils semblent avoir été écrits par deux personnes différentes. Malgré leurs différences, ces romans sont tous deux devenus des classiques dont on retrouve les figures dans la culture pop d’aujourd’hui. Votre humble narratrice ne peut s’empêcher de lire ces oeuvres en se demandant : quel est l’ingrédient qui fait que Mr Hyde et Long John Silver sont devenus mythiques ? Mais votre humble narratrice s’égare à nouveau et, pour revenir sur le droit chemin, elle va essayer de vous communiquer son intérêt pour Stevenson en deux citations, tirées de l’article “My first book – Treasure Island” (les traductions sont les miennes, toutes mes excuses)
  • “On m’a dit que certaines personnes ne s’intéressent pas vraiment aux cartes, ce dont je doute fortement.” Le roman entier vient d’une carte, de la fascination de Stevenson pour une carte qui, elle-même vient de la fascination de Stevenson pour les cartes en général. Votre humble narratrice pense que vous pouvez sentir, sous l’enthousiasme de Stevenson, votre propre curiosité pour ces cartes, ces aventures, se réveiller. Vous pourrez le voir, Stevenson écrit avec un style très direct et pourtant, il pourra vous surprendre avec de sublimes comparaisons telles que celle qu’il utilise pour décrire ses impressions devant la carte originaire de l’histoire : “L’île avait des baies qui me plaisaient autant que des sonnets.” Votre humble narratrice ne sait pas ce qu’il en est de vous, mais il s’agit tout à fait du genre de citation qui lui donne envie de se plonger dans l’aventure que cet auteur lui propose !

L’Île au Trésor commence à l’auberge de l’Amiral Benbow, tenue par le père mourant de Jim Hawkins, sa mère et lui-même. Leur vie tranquille est bouleversée par l’arrivée d’un étrange marin qui se présente sous le nom de Billy Bones, qui boit du rum comme le tonneau des Danaïdes, qui chante cette étrange chanson à répétition et qui paye Jim Hawkins pour garder l’oeil ouvert sur d’éventuels marins qui viendraient s’aventurer dans les environs.

Un jour, un marin finit par, inévitablement, arriver et donner la mystérieuse “marque noire” à Billy Bones qui, malgré sa stature et son air de vieux loup de mer, est terrifié à l’idée d’être marqué par cette tâche noire. Heureusement pour Billy Bones, sa consommation effrénée de rum l’achève avant que les marins puissent tenir la promesse de la fameuse tâche noire.

En fouillant les affaires du défunt (qui leur devait de l’argent pour le rum), Jim Hawkins découvre ce qui semble être un morceau de cuir, roulé et cousu en guise de sceau. Intrigué, le garçon saisit l’étrange objet, les étranges pièces dépareillées du coffre de Billy Bones et… le voilà mêlé à des histoires de revanches, de meurtres, d’or, de navires, d’îles mystérieuses…

Vous connaissez l’histoire.

C’est ce qui est si intriguant, pendant la lecture de L’Île au Trésor : vous connaissez l’histoire. Même si vous n’avez jamais vu d’adaptations, même si vous n’êtes pas spécialement passionnés par les pirates, vous avez une image en tête et cette image vient très précisément de ce roman. Prenez par exemple la fameuse tâche noire que les pirates livrent à celui qu’ils viendront tuer le lendemain. Prenez par exemple, l’image du pirate qui grimpe au mat avec un sabre entre les dents : la voici dans le chapitre “Israel Hands”. Votre humble narratrice ne parle même pas de l’image du pirate avec une jambe de bois et un perroquet sur l’épaule : Long John Silver est une figure mythique que tout le monde pourrait replacer. Votre humble narratrice a cependant été étonnée car elle a cherché en vain un personnage avec un oeil en moins. La quête pour déterminer l’origine des pirates avec un cache-oeil continue…

L’origine de tous les clichés modernes sur les pirates n’est cependant pas le seul intérêt du roman :  comme nous l’avons vu, Stevenson écrit avec un style très fluide. Ne vous attendez pas à quelque chose d’expérimental : le roman est écrit à l’intention de garçons en quête d’aventures, pas à celle des critiques littéraires. Cela ne veut pas dire que le roman n’a aucune valeur littéraire, loin de là : Stevenson a ce don pour, au détour d’une phrase, remettre votre perception de lui en question. Vous allez donc dévorer des pages et des pages d’aventures sur un navire, incluant des tonneaux de pommes, du rum (toujours du rum) la constitution d’un équipage, la distribution des réserves, les rudiments de navigation, bref toutes les aventures promises par le titre et la réputation de l’oeuvre. Cependant, vous allez également découvrir de magnifiques tableaux comme celui du navire échoué sur la plage, envahi par les plantes tropicales comme les ruines des poèmes romantiques. A cette image, votre humble narratrice n’a pas pu s’empêcher de penser au film de Werner Herzog, Aguirre ou la colère de dieu, où on retrouve la magnifique image du navire dans les branches des arbres. Comme quoi, l’intertextualité…

Votre humble narratrice ne peut pas vous faire un catalogue de toutes les images qui lui ont plues, mais sachez que vous allez être séduits par le style de l’auteur aussi bien que par les aventures, les complots et les retournements de situation qui se succèdent dans le roman.

Deux personnages méritent une mention spéciale : Long John Silver et Capitaine Flint.

  • Long John Silver, le personnage mythique à la jambe de bois et au perroquet dont nous avons déjà parlé. Il n’est pas, dans Treasure Island, l’image que l’on se fait du pirate menaçant, fier et dangereux. Long John Silver est un maître de la duperie. Il sourit sans cesse, se fait passer pour un cuisiner, et retourne sa veste autant de fois qu’il faudra pour s’en sortir. Malgré son apparence joviale qui inspire la confiance, le lecteur ressent, sans cesse, quelque chose de plus sombre qui vit sous ces sourires. Long John Silver est en effet décrit comme “le seul homme que le redoutable Flint ait craint.” ce qui le fait sourire avant qu’il ne vous présente son perroquet, nommé Capitaine Flint, comme si ce pirate redouté était une bonne blague. Il y a, sous le personnage mythique du roman pour garçons, quelque chose de terrifiant, qui fait de lui un méchant tout à fait intriguant.
  • L’autre personnage est bien sûr le Capitaine Flint. Le redoutable Capitaine Flint. Si l’on devait établir un parallèle entre Treasure Island et Strange Case of Dr Jekyll and Mr Hyde, on le trouverait dans Capitaine Flint. Le redoutable pirate est en effet l’élément fantastique du roman qu’il hante comme un fantôme, à la fois comme histoire et comme présence spectrale. Les pirates en parlent sans cesse comme d’une figure mythique, crainte par tous. C’est lui qui a enterré le trésor, amassé grâce à des massacres et des pillages et caché au prix d’autres massacres. Qu’a bien pu faire Long John Silver pour faire peur à un tel homme ? Que s’est-il passé entre les deux ? Comment Capitaine Flint est-il mort ? Capitaine Flint est-il bien mort ? Le roman va vous en faire douter de façon tout à fait merveilleuse. Il y a, dans Treasure Island, comme un arrière goût du gothique dont Stevenson allait s’emparer plus tard : la fin de Treasure Island ressemble, de façon fascinante, à la fin de la novella de LeFanu Carmilla.

Des livres ont été écrits sur la mystérieuse relation entre Capitaine Flint et Long John Silver, tellement les questions laissées sans réponses par le roman de Stevenson fascinent encore les esprits. La série Black Sails en est un très bel exemple que votre humble narratrice ne peut que vous recommender avec beaucoup d’insistence.

Pour finir, votre humble narratrice voudrait simplement revenir sur la question de la traduction du roman que vous pouvez choisir. Comme vous pouvez vous en douter, Treasure Island a été traduit de nombreuses fois, cependant, si votre humble narratrice ose en espérant garder son titre, elle vous met en garde contre les traductions qui peuvent, parfois, en s’adressant à un public plus jeune, simplifier le style de Stevenson, surtout en ce qui concerne la formalité du discours des pirates. Contrairement à ce que vous pouvez penser, les traductions pour les jeunes gens font plus parler les pirates comme des gentlemen que les traductions plus expérimentales.  Le style de Stevenson est certes simple et direct, mais il n’en reste pas moins fascinant. L’histoire de la traduction de l’oeuvre en français est passionnante et votre humble narratrice pourrait vous conseiller un certain nombre de traductions qui ont toutes l’air plus intéressantes les unes que les autres. Elle s’arrêtera cependant à la traduction d’André Bay qui, en tant qu’écrivain, et traducteur de nombreuses, nombreuses oeuvres anglaises classiques telles qu’Alice au pays des merveilles et Les voyages de Gulliver, donne une très belle traduction et une préface intéressante à L’Île au Trésor.

Pour conclure cette chronique, votre humble narratrice ne peut que vous encourager à découvrir ce court roman pendant l’été, tant qu’il fait encore beau, pour donner envie d’aventures et de découvertes, à la fois marines et surtout littéraires, toujours et encore.

L’image de couverture est une des illustrations du roman par N.C. Wyeth.

treasure island

Le Livre de Poche. 

275 pages.

traduction par André Bay. 

Anne-Victoire. 

À propos Anne-Victoire

Chroniqueuse

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