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un printemps sous les livres !

Pas mal de sorties ces quatre derniers mois. Du bon, du moins bon, du clairement mauvais, mais surtout quelques pépites ! Voici un tour d’horizon de quelques titres hautement recommandés ! Il y a une certaine quête d’identité et de perfection dans cette sélection. Des romans faits pour nous prendre par la main, nous montrer les choses différemment. Qui questionnent, observent, ouvrent les yeux, nous amusent ou encore nous changent pour certains ! C’est parti :

Ishmael Reed — Mumbo Jumbo

Le pitch : L’histoire de Papa LaBas, entre autres, l’histoire des Afro-Américains en particulier, dans les États-Unis du début du vingtième siècle. Une étrange infection se répand depuis le sud des USA, Djeuze Grou, chargée d’un fluide électrique revigorant. Comprenez par là la culture afro à travers une musique émergente… Le Jazz ! Une communauté de blanc, société secrète/ordre « bien pensant » de la communauté blanche protestante américaine, tente à tout prix d’éradiquer cette menace. Cette menace pour la civilisation bien pensante doit disparaître coûte que coûte. Papa LaBas quant à lui, une sorte de détective sorcier, cherche à comprendre Djeuze Grou et à le défendre contre ces suprémacistes blancs… l’ordre de la Fleur Muraille.

Pourquoi lire ce livre : Ishmael Reed fait partie de cette vague d’auteurs américains estampillés « Postmoderne » ou encore « Metafiction », mais ceci n’est pas un argument. En revanche à travers sa relecture de l’histoire américaine à travers le prisme de la culture spirituelle africaine et haïtienne, nous redécouvrons un pan de l’histoire américaine avec un autre regard. Parsemé d’illustration, et d’une grande maîtrise d’écriture, ce roman est une belle découverte/redécouverte. Ishmael Reed est un auteur talentueux qui sait, avec énormément d’intelligence, faire voir le monde différemment à travers son polar mystico/historique.

Éditions de l’Olivier,
Collection Replay,
Trad. Gérard H. Durand,
384 pages.

William Finnegan — Jours barbares

Le Pitch : le récit d’une obsession et à travers cette dernière l’histoire de William Finnegan. Ce jeune sans histoire, sans talent particulier, qui va se découvrir une passion pour le surf, pardon, une passion, une quête ! La vague parfaite, le « ride » ultime, une sorte de symbiose totale avec les éléments. Bien plus qu’un simple récit sur le surf, c’est un monde que nous découvrons à travers le regard de l’auteur, et un apprentissage qui deviendra échappatoire pour cet homme, un refuge.

Pourquoi lire ce livre : Parce que c’est un texte incroyable. À l’image de l’auteur, son récit simple et sans prétention particulière nous embarque et ne nous relâche plus jusqu’à la fin. Sa sincérité dans les mots, l’admiration qu’il nous transmet pour ce sport, l’harmonie qui se dégage de son histoire s’inscrit dans la droite lignée des grands romans d’apprentissages, des quêtes qui transforment également le lecteur. Un auteur discret, pour un récit humble qui vous touchera et très certainement vous fera voyager sur de belles vagues !

Sous-Sol éditions,
Collection Feuilleton non-fiction,
Trad. Franck Reichert,
528 pages.

William Gass — Regards

Le pitch : Recueils de nouvelles pour ce nouveau livre du grand William Gass. À travers deux longs et quatre textes plus courts, nous parcourons l’univers légèrement décalé et obsessionnel de l’auteur. Le gérant d’une boutique de photo, qui tient son magasin comme un sanctuaire et parle de photo comme d’autres de peintures ou de bons vins. Le piano du film Casablanca réinterprétant l’histoire. Ne sont rien comparé à celle du monologue de la chaise d’un barbier.

Pourquoi lire ce livre : William Gass est aussi difficile d’accès que passionnant. Ici nous tombons très certainement sur le plus tordu des livres de l’auteur, mais aussi paradoxalement le plus abordable. L’art de la digression, la maîtrise du détail. Gass compose ses récits comme un peintre qui serait en quête du tableau parfait. C’est beau, bien écrit et traduit et ce jusque dans les moindres détails. Point d’histoire à rebondissement, plutôt des instants, des fulgurances qui sont sublimées par la plume de l’auteur.

Le Cherche Midi,
Collection Lot49,
Trad. Marc Chenetier,
320 pages.

Edward Lewis Wallant — Moonbloom

Le pitch : Norman Moonbloom est le gérant d’un lot d’immeubles pour le compte de la société de son frère. Il est chargé de récolter semaine après semaine le loyer des locataires. Sa tournée est autant monotone qu’affligeante. Les immeubles sont complètement délabrés, les locataires ont toujours quelque chose qui ne va pas et son frère n’est intéressé que par les rentrées d’argent. Poussé jusqu’à ces derniers retranchements, Norman va avoir une révélation et va entreprendre la rénovation complète des appartements. Ce qui sera une révélation pour lui. Une quête de sens.

Pourquoi lire ce livre : parce que le coup de l’auteur américain totalement inconnu, décédé de préférence, qui en fait avait un talent monstrueux… On nous l’a fait, et ce quasiment chaque année. Mais cette fois-ci, c’est totalement vrai ! À travers une histoire simple, l’auteur s’amuse à dresser une série de portraits, à confronter ses nombreux personnages, le tout avec une cohérence et une intelligence incroyable. Une écriture qui n’est pas sans rappeler Elkin, Bellow ou Roth, mais c’est surtout l’humanité qui se dégage dans son histoire. Edward Lewis Wallant aime ses personnages, les connaît, les a sondés dans chaque recoin. Les dialogues sont fins, maîtrisés de bout en bout. Une grande force émane de ce récit. Quant à Norman, ce personnage témoin qui finalement chemine dans ses différents lieux au même rythme que le lecteur est tout simplement jubilatoire. Un excellent roman, qui fait du bien, et pour une fois oui ! C’est un grand auteur décédé totalement inconnu jusqu’à ce jour !

Sous-Sol éditions,
Collection Feuilleton Fiction,
Trad. Lazare Bitoun,
282 pages.

Tom McCarthy — Satin Island

Le pitch : U, il veut qu’on l’appelle ainsi, est anthropologue pour le compte d’une société londonienne. Après de plus ou moins de grandes prétentions de carrière et un essai anthropologique sur le monde nocturne, comprenez les boîtes de nuit, et une modeste reconnaissance, il se retrouve à travailler pour le mystérieux Peyman, directeur d’une puissante multinationale. Son job ? Rédiger un Grand Rapport, une sorte d’anthropologie du temps présent.

Pourquoi le lire : McCarthy est très certainement un des auteurs les plus enthousiasmants de la littérature anglaise actuelle. Un style bien à lui, quelque part entre Pynchon et Delillo, un humour subtil et désabusé, une finesse d’analyse de notre monde contemporain, le tout dans un récit construit comme un traité d’anthropologie. C’est drôle et intelligent, touchant par moment, mais c’est avant tout un roman qui percute le lecteur et l’emmène loin des sentiers battus. Pour les plus curieux, il faut s’intéresser à la « société secrète » créée par l’auteur. Enfin pour les plus aguerris vous allez adorer les nombreux clins d’œil littéraires, notamment au début du chapitre deux. Un très gros coup de cœur pour ce roman !

Éditions de l’Olivier,
Trad. Thierry Decottignies,
208 pages.

Eduardo Kohn — Comment pensent les forêts

Le pitch : Vers une anthropologie au-delà de l’humain… ce sous-titre pourrait résumer le livre à lui seul. Eduardo Kohn a suivi sur plusieurs périodes le peuple Runa. Un peuple amazonien qui a la particularité d’interagir et d’intégrer dans leur quotidien la faune et la flore. Comme par exemple la chasse croisée avec les pumas qui est finalement une totale entente entre deux espèces. C’est également accepter et vivre avec les bons et mauvais côtés qu’offre cette nature. Remettant en cause l’anthropologie actuelle se basant sur l’homme et son environnement « humain », l’auteur, à travers son expérience, offre aux lecteurs une nouvelle vision du monde, plus en adéquation avec ce dernier.

Pourquoi le lire : Il est presque nécessaire de le lire, pour se changer notre vision du monde, penser différemment et interagir de manière plus responsable. En osant remettre en cause les fondements de l’anthropologie et de l’ethnographie moderne (celle de Levi-Strauss et son « Tristes tropiques » entre autres), Eduardo Kohn prouve que le monde n’est pas comme nous pouvons le percevoir, mais est beaucoup plus vaste et nuancé que ce que nous croyons. Pourquoi un livre nécessaire ? Car notre époque est à un tournant majeur, qu’il y a nécessité de redéfinir notre manière d’être, de penser et d’agir, et que « Comment pensent les forêts », à travers son étude du peuple Runa, donne certaines clés de compréhensions qui peuvent avoir un réel impact sur le long terme.

Éditions Zones Sensibles,
Trad. Grégory Delaplace,
336 pages.

Ted

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Fondateur, Chroniqueur

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