L’univers d’Hideyasu Moto est peuplé de personnages à l’apparence mignonne et biscornue. Dans ses mangas, les enfants ont souvent un visage en forme de patate et piquent-nique entre amis ou camarades de classe à la campagne quand ils ne s’occupent pas de leur écureuil prénommé Dior.
Mais ne nous fions pas à ces paysages champêtres ni à ces visages tout ronds, car cet auteur adepte du style dit « Heta-uma » (que l’on peut interpréter par « mal fait, bien fait » ou encore « mauvais-bon ») excelle dans l’humour grinçant et le propos absurde.
Rassemblant une petite vingtaine d’histoires courtes aussi improbables les unes que les autres, Une Chouette vie est le tout premier recueil d’Hideyasu Moto traduit en français. De mignon, ce livre n’a pourtant que le titre car l’auteur y immisce, mine de rien, les comportements humains les plus tordus. Ainsi, les personnages aux proportions cartoonesques incarnent de façon délirante la perversité, la rancœur ou encore la malhonnêteté tout en évoluant au cœur de contextes décalés où le happy-ending est rarement de mise.
N’hésitant pas à pousser le loufoque jusqu’au surréaliste, le mangaka balai un large panel de situations, incorporant à ses scénarios des vénusiens venus envahir la Terre, un lapin vendeur à domicile tellement kawaï qu’on lui pardonne les pires crasses ou bien un écolier capable de tuer pour que la fille de ses rêves lui adresse simplement la parole.
Délicieusement cinglant, Une Chouette vie fait partie de ces œuvres underground qui ne laissent pas indifférent. Frôlant l’imaginaire punk par l’acidité des thématiques abordées et par la patte graphique lâchée, ce manga mêle irrévérencieux et fausse candeur pour une ambiance subtilement dérangeante. Alors, bienvenue à Hideyasu Moto et au mouvement Heta -uma !
Misma éditions
Traduit du japonais par Charles Lamoureux
232 pages
Caroline