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Robert Bolaño – Amuleto

Bien que son nom soit synonyme de grandiose, si ce n’est d’incontournable contemporain de la fiction littéraire, Bolaño reste une énigme et indirectement l’objet de fantasmes. Une réputation folle pour des livres aussi bien complexes et référencés, que généreux et tendrement loufoque au-delà de la noirceur apparente qui nous attrape à la gorge. Un récit de Bolaño c’est avant tout un récit de vie, dans toute sa grandeur et sa part d’ombre.

“Amuleto” n’échappe pas à la règle. Court récit faisant suite au monumental « Détective sauvage », l’auteur revient sur un des personnages clés, pour en explorer sa psyché, ses travers et ses passions.

Ainsi, Amuleto, nous raconte la vie et le parcours de Auxilio Lacouture, exilée Uruguayenne amie des poètes et de la poésie. Nous la retrouvons en septembre 1968, au quatrième étage de l’université, enfermée dans les toilettes. Elle se cache de la police, car son histoire prend place durant les dramatiques répressions.

Ainsi, durant 13 jours, et 13 nuits, Auxilio Lacouture, enfermée dans les WC, revient sur sa vie, son parcours, ses rencontres, autant d’éléments constitutifs s’entremêlant. Passé et futur, ici et ailleurs, 13 jours et nuits d’explorations autobiographiques donnant à voir et comprendre la mère de tous les poètes.

« Ça va être une histoire de terreur »

Tout est dit dès l’incipit. Ici peu de réjouissance. Tout est notion et variation autour de l’obscurité, de l’omniprésence du danger, de la violence (verbale comme physique). “Amuleto” vient jouer les troubles fêtes dans le fond, mais se fuit lui-même par la forme.

Comme un récit éclaté, jouant sur les allers/Retours, Auxilio donne le sentiment de fuir ce passé, ses agresseurs et bourreaux. Ayant conscience d’avoir échappé à la violence, elle n’en demeure pas moins marquée, qu’elle le minimise ou le tourne par l’absurde, comme si la réalité ne devait avoir place, pas dans une vérité crue, mais dans une version légèrement fantaisiste, la sienne.

Mais bien que la narration se joue par moment de nous, c’est bien face à l’atrocité des répressions policière et militaires que nous nous retrouvons, c’est bien la violence faite à la jeunesse, une mémoire faisant appel aux meurtres, aux disparus pour dire ce que le Mexique avait de plus insidieux à cette époque.

Pouvant fonctionner comme une suite, ou plutôt un parallèle, à l’incroyable « Les détectives sauvages », « Amuleto » n’oublie pas deux choses. Premièrement, il est un roman de Roberto Bolaño, et ainsi il s’inscrit dans son univers et se construit en tenant compte de sa mythologie, donc quoi de plus naturel que de retrouver des figures qui nous accompagnent dans bons nombres de ses écrits. Deuxièmement, «Amuleto » arrive à fonctionner indépendamment, ainsi la lecture de son précédent roman ne s’avère pas indispensable, tant l’histoire fonctionne et se suffit à elle-même pour se déployer sur plusieurs temporalités et dimensions.

Il y a des belles découvertes à faire en littérature, et des découvertes indispensables. Les œuvres de Bolaño sont indispensables. “Amuleto”, sans pour autant être son chef d’œuvre, reste un récit court, prouvant encore une fois le talent immense d’un auteur parti bien trop tôt.

Éditions Points,
Trad. Robert Amutio,
160 pages,
Ted.

À propos Ted

Fondateur, Chroniqueur

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