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Stephen Graham Jones – Un bon indien est un indien mort

Bien des surprises s’invitent lors de cette rentrée littéraire. Force est de constater, que cette année, en termes de production de littérature de genre nous sommes plutôt gâtés. Et il faut bien reconnaître qu’en 2022  l’étrange s’impose comme étalon maître avec des textes audacieux comme le magnifique livre de Sue Rainsford ou encore Mordew d’Alex Phelby, sans oublier l’excellente, que dis-je indispensable réédition d’une certaine maison de Danielewski, prenant à rebours les nombreux lecteurs s’attendant à une histoire simpliste, ou encore la mystérieuse fôret Vorrh de B. Catling en poche.

Dans ce vaste paysage de l’imaginaire, assez cosmopolite et plutôt prolifique, nous avons la joie de découvrir un nouveau roman de Stephen Graham Jones, chez Rivages ! Après nous avoir bluffé avec « Galleux » ( La Volte éditions, 2020), le voici qu’il redébarque dans toute sa splendeur horrifique pour nous parler d’indiens, de natures, de légendes et de lignées. Voici venu « Un bon indien est un indien mort ».

Se centrant sur quatre personnages, quatre Indiens de la tribu Blackfeet, nous les suivons dans une fuite en avant, dix ans après une partie de chasse illégale. Tour à tour, ils vont se retrouver confrontés à la vision d’un caribou fantomatique, leur annonçant une mort prochaine et de préférence dans d’horribles conditions.

Ainsi, nous suivons, chacun leur tour, les protagonistes dans leurs descentes en enfer et leur aliénation, le passé les rattrapant pour se venger.

Une histoire de vengeance, qui au premier abord peut paraître assez simpliste, le raccourci de s’imaginer que c’est du déjà lu est tentant, mais ce serait faire une grosse erreur. Car ici l’auteur utilise l’intrigue de départ pour nous parler des amérindiens, en particulier des Blackfeets. Dans son roman est établi un état des lieux de la condition amérindienne, de ses traditions perdus ou désuètes, du poids que peut représenter le patrimoine de leur tribu, et des difficultés d’adaptation dans un monde de blanc et implicitement (ou non) raciste envers eux, les parquant ou les méprisants dès que l’occasion se présente. Ce qui s’impose, en creux, comme une auscultation d’une communauté en prise avec son époque, tentant avant tout de survivre et de trouver du sens dans ce Montana dépersonnalisé.

Ainsi, par le biais des quatre protagonistes, nous suivons quatre chemins de vie différents, et la fille d’un des indiens, s’impose comme le témoignage et la résolution de cet aveu constant d’échec qu’est celle d’être amérindien dans un monde de blancs.

L’intrigue, quant à elle, fonctionne, cette chasse vengeresse s’impose dans toute sa tension et dans son angoisse, nous promettant de belles sueurs froides et laissant peu d’espoir quant à une résolution heureuse. C’est angoissant, captivant et on en redemande.

Que dire de plus, si ce n’est, que si vous cherchez un vrai bon roman d’horreur, angoissant, mais proposant plus que juste une histoire qui fait peur, alors « Un bon indien est un indien mort » est le titre inattendu, la belle surprise de cette rentrée. D’une écriture efficace, l’auteur n’oublie jamais l’attente du lecteur sans pour autant délaisser le message sous-jacent qu’il souhaite transmettre.

Et ce n’est pas Stephen King qui dirait le contraire, tant la comparaison entre les deux auteurs quant au traitement de leurs histoires et personnages est pertinente. En bref, une lecture plaisir efficace et réjouissante. Vous n’aurez jamais autant aimé avoir peur !

Éditions Rivages,
Collection Rivages/Noir,
trad. Jean Esch,
334 pages,
Ted.

À propos Ted

Fondateur, Chroniqueur

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