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Éditions Asphalte

Nées en 2009, les éditions Asphalte nous proposent un catalogue noir et urbain, dans lequel on peut croiser des auteurs venus de tous horizons qui explorent les méandres des villes d’aujourd’hui, avec leurs rues sombres et leurs complexité. Estelle Durand et Claire Duvivier ont bien voulu répondre à notre petit questionnaire de présentation !

1/ Qu’est-ce qui vous a décidé à sauter le pas et à créer votre maison d’édition?

Le just in time, c’est très important. Et là, au printemps 2009, toutes les conditions nous ont semblé réunies pour nous jeter corps et âme dans le projet d’une maison d’édition. Asphalte a vu le jour officiellement en juillet 2009, nous avons trouvé un diffuseur-distributeur en décembre 2009 et publié nos premiers livres en mai 2010. Bientôt 5 ans, donc !

2/ Asphalte est centré sur les littératures urbaines, la contre-culture. Comment définiriez-vous l’un et l’autre? Pourquoi avoir choisi de travailler dans ce domaine?

L’urbain et les contre-cultures, oui, ce sont deux des ingrédients qui nourrissent la maison et les textes que l’on publie. Plus que de ligne, nous parlons généralement d’esprit. Je n’imagine pas nos auteurs comme des personnes que l’on placerait en file indienne et qui se ressembleraient toutes. Non, c’est plutôt une communauté d’esprit, une manière d’être. Des voix, surtout, qui nous touchent et qui disent quelque chose de la ville aujourd’hui, de ce que c’est que de vivre dans tel ville, tel pays de nos jours, de ce que la ville produit sur l’homme, et comment les divers mouvements contre-culturels (musicaux, culturels, sportifs…) ont transformé l’individu et son environnement social.

3/ Comment choisissez-vous les textes, les auteurs avec lesquels vous allez travailler?

Asphalte, c’est d’abord une maison, on y accueille des auteurs, et leurs textes. Il serait difficile de dire quelle est la part des romans qui sont venus à nous et ceux que l’on est allées chercher, mais il y a un peu de tout cela. Des lectures personnelles, des conseils, des projets apportés par des lecteurs, des amis, des collaborateurs d’un peu partout dans le monde, et des propositions d’agents aussi.

4/ Comment se passe le travail avec l’auteur (et le traducteur le cas échéant) depuis la sélection de l’ouvrage jusqu’à sa sortie?

Le travail sur le texte, en lien avec le traducteur et l’auteur, est la partie cruciale, le cœur de notre métier d’éditeur de littérature. Et cela prend du temps, le temps est nécessaire pour, de notre côté, nous plonger dans le texte, le style, la voix, puis prendre du recul pour le corriger, le retravailler, et enfin “digérer” ces corrections pour aboutir au résultat le plus parfait possible, le plus en adéquation avec la version originale. Ce travail éditorial se fait donc dans un dialogue constant, dans l’échange permanent, avec attention et passion.

5/ Comment vous est venu l’idée de la série « Asphalte noir » (Marseille noir, La Havane noir, Brooklyn noir..) ? Comment se passe la création pour ces recueils: les textes sont-ils écrits pour ou s’agit-il d’un travail de compilation?

Lorsque nous avons découvert la collection américaine Akashic Noir Series, publiée donc par Akashic Books, éditeur indé basé à Brooklyn, on s’est dit avec Claire que c’était exactement ce qu’on avait envie de faire en France : mêler littérature et topographie, explorer la ville par la littérature – ici, noire en l’occurrence. Et nous avons eu envie de faire découvrir cette collection d’antiguides touristiques aux lecteurs français, en traduisant quelques titres par an, que nous sélectionnons en fonction des villes traitées, de la qualité des nouvelles. Puis, en 2014, Asphalte a inversé la machine, en publiant un inédit, qui n’existait pas aux États-Unis, donc : Marseille Noir. Nous avons pour ce titre choisi l’anthologiste et les contributeurs. Et c’est par la suite, en septembre 2015, que cet opus paraîtra aux États-Unis. Ce livre-ci suivra donc le chemin inverse des autres. Nous venons d’éditer, de la même façon, Bruxelles Noir, dirigé par Michel Dufranne, et cette anthologie paraîtra chez Akashic Books au second semestre 2016.

6/ Votre catalogue est très varié dans les origines des textes (anglais, italien, australien, thaï), mais on ne peut que noter une importante place donnée à la littérature hispanophone, notamment d’Amérique du Sud. Était-ce une volonté de départ ou cela s’est-il dessiné au fil du temps?

Mettre l’accent sur des textes venus d’Amérique du sud n’était pas vraiment inscrit dans le projet initial. Nous souhaitions plutôt publier de la littérature de tous pays. Mais comme l’édition est une histoire de rencontres, il se trouve qu’on nous a proposé plusieurs très bons auteurs, très bons textes qui ont trouvé un écho chez nous : éclatement des genres, grande liberté par rapports aux “étiquettes” convenues, voix très maîtrisées et très affirmées… De fil en aiguille, nous avons publié un grand nombre d’auteurs argentins, dans le roman noir mais pas que, mais aussi des auteurs vénézuélien, cubain, chilien, péruvien.
Nous n’avons pas de quota, par exemple au second semestre, nous aurons deux romans argentins et un polar chilien. Mais au premier semestre 2016, nous aurons deux Anglo-saxons : un Australien et un Américain.

7/ Comment vous est venu l’idée de la playlist à la fin de chaque livre?

Nous voulions des livres qui nous ressemblent, ouverts sur d’autres “arts” ou d’autres formes d’expressions. La musique s’est imposée, et l’idée que l’auteur puisse faire découvrir son univers par un autre biais que ses mots seuls plaît beaucoup. Les auteurs s’impliquent beaucoup dans la réalisation de cette playlist. Nous imprimons les morceaux choisis sur le rabat de fin du livre mais la bande-son est aussi en écoute sur notre site, en streaming.

8/ Un coup de projecteur sur une sortie plus ou moins proche?

En mai, Asphalte fera découvrir une nouvelle voix. Nous avons à cœur de suivre nos auteurs mais mettre un coup de projecteur sur un nouvel écrivain est toujours très enthousiasmant. Il s’agit cette fois de Kiko Amat, un Espagnol déjanté, à l’image de ses personnages. Il a quitté le système scolaire très tôt pour se mettre en quête de la chanson pop parfaite. Il a été DJ, s’est impliqué dans le fanzinat, il vit avec ses 4000 vinyles et sa Vespa rouillée… Et son roman, Tout ce qui fait BOUM, nous entraîne à Barcelone en compagnie de Pànic, un jeune homme moitié anglais, moitié espagnol, prêt à beaucoup de choses pour faire partie d’un groupe, d’une bande. Après avoir été surréaliste, situationniste, adorateur d’Aleisteir Crowley, il se prend de fascination pour un groupe de dandys anarchistes qu’il surnomme les Vorticistes. Ces derniers vont l’initier aux amphètes et à la lutte armée… Un livre très drôle, frais, joyeux, neuf.

9/ Quel(s) texte(s) auriez-vous aimé publier?

Des tas ! Que ce soit des textes qui m’ont marquée par leur style et leur univers (je pense à Mantra de Fresan au Passage du Nord-Ouest) ou des textes-mondes complètement à part, comme La Maison des feuilles chez Denoël.

10/ Quel(s) texte(s) êtes-vous fier d’avoir porté?

Comment pourrais-je n’en citer qu’un ? Tous les Asphalte, même si j’ai toujours une pensée particulière pour Shangrila, de Malcolm Knox, dont la traduction, assurée par Patricia Barbe-Girault, a été un grand moment d’éditrice, tant pour la richesse de la langue de l’auteur, que pour le mélange de jargon de surf et de tics de langage du personnage.

http://asphalte-editions.com/
Merci à Estelle Durand et Claire Duvivier pour leurs réponses !

À propos Marcelline

Chroniqueuse/Co-Fondatrice

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