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Richard Cowper – L’oiseau blanc de la fraternité

« Il existe un mot parfait qui aurait pu être inventé pour décrire le type d’entreprise dans laquelle je m’étais engagé. Il y a trente-cinq ans, alors que j’étudiais la littérature anglaise à l’université, j’ai découvert le mot : heuristique. Il signifie grossièrement «  l’art d’inventer, de faire des découvertes en résolvant par soi-même des problèmes à partir de connaissances incomplètes. » Autrement dit, je suppose que cela pourrait être interprété comme « voyagez dans mon monde pour découvrir où on est allé ». »
Richard Cowper

Alors que les éditions Argyll, nous régalaient en 2021 avec la réédition du « Crépuscule de Briareus », voici que la jeune et talentueuse maison d’édition ose un gros pari. Tout en continuant le travail de réédition des livres de Richard Cowper, cette dernière se permet de proposer une édition intégrale, de son œuvre emblématique, à savoir : L’oiseau Blanc de la fraternité.

Une œuvre ambitieuse, qui bénéficie ici du sublime travail de couverture de Xavier Colette, toujours aussi inspiré, et un travail de révision de la traduction par Pierre-Paul Durastanti. Pour proposer in fine, un livre 631 pages d’une générosité équivalente au Lyonesse de Jack Vance. Vous l’aurez compris, nous sommes face à une œuvre majeure et incontournable, qui méritait bien une telle proposition éditoriale pour lui rendre hommage.

Le roman s’ouvre sur un monde, le nôtre, au 31e siècle. Alors qu’un cataclysme a fait monter les eaux dans le monde entier quelque part au début du vingtième siècle, L’Angleterre est devenue une myriade d’îles – et nous supposons aussi ailleurs -. Malgré cet incident, l’humanité à continué à vivre, mais à régressé dans une forme de moyen-âge post new-age, replaçant une forme de religion au centre des sociétés. Ordonné par les pères gris de l’église et ayant à leurs soldes Faucons et Corbeaux, comprendre ici Soldats et Espions. Un monde donc régit par une forme d’oppression. Mais dans les villes et villages, les habitants entendant parler d’une histoire, celle d’un mystérieux oiseau blanc, qui serait porteur d’un renouveau moins lugubre et incertain. Un culte naissant qui prend de l’ampleur et se confronte à l’oppression mise en place dans ce futur post-apocalyptique et sombre.

Enfin n’oublions pas de souligner le fait que mille ans plus tôt, Carver, un chercheur, suite à des tests en laboratoire, un voyage d’exploration « ordinaire », ne se réveille pas.

« L’oiseau Blanc de la fraternité » dans son édition intégrale, regroupe pour enfin la nouvelle « Le chant aux portes de l’aurore », et les trois romans publié entre 1977 et 1982, à savoir « La route de Corlay », « La moisson de Corlay » et enfin « Le testament de Corlay ». Ce qui pour la première fois permet d’avoir une vision d’ensemble de l’oeuvre dans une magnifique édition intégral.

Ce qui fascine le plus, chez Richard Cowper, c’est ce travail sur les ambiances. Par une économie de mots, il arrive rapidement à insuffler de la vie à son univers, un lieu, une tension, ou encore un mystère dans le dialogue et les non-dit. Un travail minutieux et faussement simpliste, offrant une profondeur et une richesse passionnantes à parcourir. Nous sentons l’iode, l’embrun, les tempêtes, nous devinons les récifs, nous nous réchauffons près du feu de cheminée. Mais l’auteur sait servir son histoire avec son style, donnant une dimension à la fois social et mystique à un univers en gestation ne s’étant jamais réellement remis du cataclysme des années deux milles. Ce permettant même de venir contrasté avec un futur moyen-ageux et ayant fait  le deuil de toutes formes de technologies vraiment poussées, par opposition à un présent technologique. Une inversion de progrès original et servant à merveille les textes de Richard Cowper.

Le travail de révision de la traduction, confié à Pierre-Paul Durasanti, passionné de l’oeuvre depuis toujours, qui a su apporter un soin méticuleux à l’harmonisation et à la correction des quelques erreurs de la précédente traduction de Claude Saunier. Un travail d’orfèvre, qui offre une seconde jeunesse à une œuvre passionnante.

Abordant des thématiques comme le pouvoir, l’écologie, ou encore la religion, l’auteur n’est pas sans rappeler, comme je le disais plus haut Jack Vance et son cycle Lyonnesse ( trilogie qui sortira après le cycle de Cowper), mais aussi Gene Wolfe ou encore et surtout Roger Zelzany et ses princes d’Ambres. Des Œuvres qui auront toutes en communs d’aborder la littérature de SFFF par le truchement des intérêts de 70/80’s comme l’explosion de courant dit « New age », ou les premières réelles inquiétudes quant à des événements climatiques inquiétant. Ce qui aujourd’hui donne une certaine patine à l’œuvre de Richard Cowper, lui conférant un charme fou et renforçant indirectement l’œuvre dans son propos et son univers.

Cette réédition, en édition intégral, de « L’oiseau blanc de la fraternité » est une réussite totale. Les éditions Argyll continue de nous faire redécouvrir Richard Cowper, et par la même occasion nous montre, si vous n’étiez pas déjà convaincu, le talent indéniable d’un auteur aussi généreux et passionné, offrant des textes plus fins et ancrés dans son époque qu’il n’y paraît. Un incontournable de cette fin d’année.

 

Argyll éditions,
Trad. Claude Saunier,
revision Pierre-Paul Durastanti,
631 pages,
Ted

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Fondateur, Chroniqueur

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